Evolution à moyen terme d'un écosystème estuarien : le bassin de Marennes-Oléron

Le bassin de Marennes Oléron, premier bassin ostréicole français, est une zone estuarienne soumise aux pressions anthropiques. Les paramètres météorologiques : température, insolation, pluviométrie déterminent pour une grande part les conditions saisonnières de température et de salinité de l'eau de mer et contrôlent les apports de sels nutritifs, la production primaire et secondaire du bassin. La tendance en température de l'air (Météo -France) reste voisine de 12,5°C entre 1950 et 1980, puis augmente de plus de 1°C en 20 ans. Durant le même demi-siècle, la tendance de l'insolation passe de 198 heures à 176 heures, correspondant à une perte de Il %. La distribution saisonnière des apports en eau montre que la pluviométrie printanière a augmenté de près de 30 % entre le milieu du siècle dernier et les deux dernières décennies. Les précipitations montrent également un décalage de saisonnalité et un déséquilibre dans la répartition de leur abondance au cours de ces dernières décades. Ces évolutions sur le moyen terme, s'accentuent au cours des 2 dernières décennies et se répercutent sur l'écosystème estuarien. Cette étude montre que les pics de productions primaires (blooms phytoplanctoniques), principale ressource alimentaire des huîtres, se sont progressivement déplacés du mois de mai au mois de juin au cours des 3 dernières décennies. Température et ressource trophique conditionnent la croissance et la reproduction de l'huître C.gigas. Une étude effectuée au cours de l'année 2000 sur 4 populations d'huîtres en élevage à plat et sur table montre nettement un exemple de "discontinuité" dans le processus de vitel1ogénès(::, souvent rencontré ces dernières années. Ralentissement de la vitel10génèse lié au retard et à l'étalement des blooms phytoplanctoniques, "antagonisme biologique" affectant les huîtres, et (ou?) dysfonctionnement physiologique "épuisant" l'huître au moment de la maturation (alternance de différentes voies métaboliques énergétiques), sont autant de pistes dont l'exploration doit se poursuivre pour la compréhension des mortalités estivales. Ce comportement physiologique peu "économe" peut être la manifestation d'une réponse adaptative de Crassostrea gigas à l'évolution climatique. L'augmentation significative de la température et la baisse de l'insolation exercent des effets inverses sur le plan du métabolisme; lia première dans le sens de l'accélération de la gamétogenèse et la seconde dans le sens d'un retard dans la vitel10génèse par manque de disponibilité alimentaire. L'étalement de la durée de la vitel10génèse ainsi que le décalage saisonnier des pontes au fil des décennies, sont autant de réponses biologiques qui reflètent les effets du "global change" sur la productivité naire de l'écosystème estuarien du Bassin de Marennes Oléron.

Mot-clé(s)

Ressource trophique, Crassostrea gigas, Production primaire, Bassin Marennes Oléron, Ecosystème

The Marennes Oléron Bay, the main French oyster culture basin, is an estuarine zone which is subject to anthropic pressure. Meteorological parameters such as temperature, insolation, pluviometry determine, for the most part, the water temperature and salinity conditions for each season and control the nutrient fluxes, as well as the primary and secondary production of the basin. The average air temperature (Météo -France) stays around 12.5°C between 1950 and 1980, then rises more than 1°C in 20 years. In those 50 years, average insolation drops from 198 hours to 176 hours, corresponding to an 11% decrease. Seasonal distribution of water inputs shows that spring pluviometry increased by 30% between the 1950's and the last two decades. Precipitations also show a shift in seasons and in the distribution of their quantity over the last decades. These medium term evolutions intensify over the last two decades and have consequences on the estuarine ecosystem. This study shows that the primary production peaks (phytoplanktonic blooms), oysters' main food supply, have slowly shifted from May to June over the last 3 decades. Temperature and trophic resource are determining factors for the oyster C.gigas.'s growth and reproduction. A study conducted in 2000 on 4 on-bottom and off-bottom oyster populations is a good example of the "discontinuity" in the yolk formation that has often been met for the last few years. Slowing down of the yolk formation because of late or staggered phytoplanktonic blooms, "biological antagonism" affecting oysters, and (or?) physiological dysfonctioning causing the oyster to be "tired" during maturation (alternance of different metabolic energetic routes), are the different paths that need to be explored in order to understand summer mortality. This "unthrifty" physiological behaviour could be the adaptive answer of Crassostrea gigas to climatic evolution. The temperature rise and the insolation drop have antagonistic effects on metabolism: the first one accelerates the gametogenesis and the second delays the yolk formation through lack of food. The staggering of the yolk formation and the seasonal shift of the egg-laying over the decades, are two of many biological answers to "global changes" and their effect on the productivity of the estuarine ecosystem in the Marennes Oléron Bay.

Texte intégral

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Comment citer
Soletchnik Patrick (2002). Evolution à moyen terme d'un écosystème estuarien : le bassin de Marennes-Oléron. Présentation Journées du Département des Ressources Aquacoles, La Tremblade, 17-18 juin 2002. https://archimer.ifremer.fr/doc/00000/3381/

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