Etude des anomalies chromosomiques chez Crassostrea gigas - Contrat Région Poitou-Charentes 2000-2006. Convention 2004
Des anomalies cytogénétiques, telles que l'aneuploïdie, sont connues pour être communes chez les bivalves (Ahmed et Sparks, 1970; Dixon, 1982; Thiriot- Quiévreux, 1986; Martínez-Expósito et al., 1992; Li et Havenhand, 1997). Ce phénomène, qui a pour origine principalement une non-disjonction des chromosomes pendant la mitose ou la méiose (Bond et Chandley, 1983; Martin et Rademaker, 1990), est souvent létal chez les animaux supérieurs tels que les mammifères ou bien associé à un retard de croissance (Vig et Sandberg, 1987). Chez Crassostrea gigas, l’aneuploïdie est l’altération du nombre diploïde normal de 20 chromosomes (Ahmed et Sparks, 1967; Thiriot-Quiévreux, 1984) en cellules hypodiploïdes avec 19, 18 ou 17 chromosomes (Thiriot-Quiévreux et al., 1992). Les causes environnementale et/ou génétique de l’aneuploïdie restent encore largement inconnues, mais la compréhension de ce phénomène progresse. Une corrélation négative entre l'aneuploïdie somatique et le taux de croissance a déjà été décrite dans la descendance d'huîtres cultivées C. gigas (Thiriot-Quiévreux et al., 1988, 1992; Leitão et al., 2001a) et dans les populations naturelles de la même espèce (Zouros et al., 1996). De plus, l'hypothèse d'une base génétique dans la détermination de ce caractère (Leitão et al., 2001b) a été émise et il existerait une perte préférentielle de certains chromosomes (Leitão et al., 2001c). Nos études précédentes ont permis de mettre en évidence un effet toxique direct de l’atrazine (herbicide de la famille des triazines) sur l’aneuploïdie d’huîtres creuses C. gigas en milieu contrôlé (Bouilly et al., 2003). Celle-ci a été approfondie et il s’est avéré que l’impact observé persistait dans le temps (deux mois et demi) et à la génération suivante (Bouilly et al., 2004). Par contre, l’atrazine n’a pas d’effet sur l’aspect qualitatif de la perte de chromosome dans le sens où les chromosomes perdus sont les mêmes que pour une aneuploïdie « spontanée » (Bouilly et al., soumis). L’approche environnementale a été poursuivie avec un autre polluant, le cadmium. Aux concentrations testées, des différences significatives ont été observées entre les traitements chez des huîtres adultes (Bouilly, 2003a) mais pas chez des juvéniles ni sur la descendance (Bouilly, 2003b). De plus, diverses études ont été réalisées dans le milieu naturel afin d’avoir des éléments de comparaison in situ et en conditions contrôlées. Des familles issues d’écloserie, ayant des mortalités différentielles dans le milieu, ont été comparées. Nous n’avons observé aucune différence significative entre les familles, par contre, une différence selon les conditions environnementales a pu être montrée (Bouilly, 2003b). Ce rapport présente d’autres résultats obtenus en milieu naturel. Tout d’abord, l’impact de conditions d’élevage différentes sur le taux d’aneuploïdie d’huîtres creuses C. gigas issues d’écloserie a été évalué. Ensuite, le taux d’aneuploïdie d’huîtres issues du milieu naturel (vasière de Brouage) a été estimé à différentes périodes au cours d’une année. Une nouvelle étude de l’aneuploïdie entre lignées consanguines et leurs hybrides a été réalisée afin de poursuivre l’étude des facteurs génétiques. Enfin, nous nous sommes intéressés plus finement aux chromosomes manquants dans les cellules aneuploïdes, par la technique de marquage par digestion enzymatique récemment mise au point sur les huîtres. L’expérience a été réalisée sur des animaux dont le taux d’aneuploïdie important avait été induit par l’exposition de leurs parents à de l’atrazine.