Effets de facteurs environnementaux (émersion, ressource alimentaire, ...) sur la survie de naissains d'huîtres creuses dans les pertuis charentais
Des observations faites en 2009 et 2010 en estuaire de la Seudre montrent que la survie du naissain d’huîtres sauvages s’échelonne de 90% à 10% sur une structure verticale en béton, selon l’altitude de fixation. Plusieurs hypothèses proposées alors, relèvent : de la sélection précoce, de la résistance physiologique, de l’exposition à de plus fortes températures, du temps de présence dans l’eau (contamination et ressource trophique), et de la relation des naissains avec le sédiment. En 2010 et 2011, des expérimentations seront réalisées pour tester ces différentes hypothèses ; En 2010, sur le site ostréicole d’Agnas (bassin de Marennes Oléron) l’expérimentation vise à préciser l’effet de l’altitude des parcs, de l’exposition et de la déplétion, par « enrobage » des naissains par des moules adultes dans des paniers. La mortalité moyenne est de l’ordre de 60%. Seule la condition standard d’élevage à un coefficient de parc de dépôt haut (coef 35) permet un gain de survie significatif de l’ordre de 20-22% par rapport aux conditions d’élevage, plus profondes, à coefficient de 55 ou 80. L’émersion réduit bien l’impact de l’épidémie sur les naissains. L’effet de déplétion trophique induit par les moules sur le site à coef. 55 est du même ordre de grandeur, vis à vis de la cinétique de mortalité, que la réduction d’impact des mortalités sur les huîtres dans des conditions d’émersion quotidienne et plus prolongée sur le site à coef. 35 (par rapport aux autres sites à coef. 55 et 80). A l’issue de l’expérimentation 2010, parmi les hypothèses formulées, le risque de contamination ou d’infection du naissain qui augmente avec le temps de résidence dans l’eau, semble bien être l’hypothèse la plus valide. Une des questions sous jacente à cette hypothèse est de savoir si l’émersion agit en réduisant le risque de contamination ou l’accès à la ressource trophique. En 2011, l’expérimentation est menée en écloserie sur la base d’un plan d’expérience à deux facteurs croisés : l’immersion (50% et 100%) et l’alimentation (complément en algues ou pas). Environ 150 naissains sont collés individuellement sur 16 plaques plongées chacune dans 16 bacs identiques. Les 4 conditions sont représentées en triplicata ; la 4ème plaque de chaque condition servant aux prélèvements de naissains pour la recherche des organismes pathogènes : virus OsHV- 1 et vibrio V. aestuarianus et V. splendidus. Dans cette structure expérimentale confinée (taux de renouvellement d’environ 200%), avec une température d’élevage toujours supérieure à 16-17°C, pour chacun des bacs, l’épidémie dure entre une semaine et 10 jours. Au terme de cette période la mortalité est insignifiante pendant près d’un mois, c’est à dire jusqu’à la date d’arrêt de l’expérimentation. A cette date, la mortalité moyenne des 12 bacs est de 52%. Les mortalités finales sont comprises entre 55 et 85% pour les 9 bacs sur 12. Malgré la forte contamination initiale des huîtres en virus OsHV-1, 3 bacs sur 12 ne vont pas développer d’épisode de mortalité; la mortalité reste comprise entre 1 et 13 % pour ces 3 bacs. Les naissains épargnés sont principalement issus de la condition à immersion 50% avec un faible apport alimentaire (pas de complément algal dans la ration) (2 bacs sur 3). La condition expérimentale : immersion 50% et apport complémentaire en algues, subit une mortalité de l’ordre de 57 % inférieure aux valeurs de 72-73% des conditions d’élevage en immersion permanente (avec et sans apport d’algues complémentaires). C’est donc bien l’émersion qui apparaît ici comme le facteur principal permettant un gain de survie des naissains. L’alimentation semble intervenir en interaction avec l’émersion ; le bénéfice lié à une émersion de l’ordre de 50% (équivalent à un parc de dépôt sur l’estran) disparaîtrait si l’apport alimentaire est conséquent ... Le processus de mortalité ne semble pas être en lien direct avec le processus de croissance. Ce ne sont pas les huîtres les plus « poussantes » qui meurent en premier quand le processus d’infestation est engagé. Par contre un phénomène d’affaiblissement (arrêt de croissance) en lien avec une infestation conjointe par le virus OsHV-1 et des bactéries du groupe Vibrio splendidus est bien observé à la fois sur des lots de naissains qui subissent un épisode de mortalité, et pour d’autres qui ne subissent pas de mortalité. Chez les huîtres survivantes des bacs d’élevage ayant subi un épisode infectieux avec une forte mortalité, la charge virale peut atteindre 106, 107 copies/mg de chair. Chez les huîtres qui ne présentent pas ou peu de mortalité, la charge virale observée augmente jusqu’à des valeurs d’environ 5 103 copie par mg. Un ralentissement de croissance est également visible, mais la mortalité reste faible. On peut penser qu’il existe une interaction entre le virus OsHV-1 et V. splendidus, car quand la concentration du premier décroît très fortement au bout d’un mois d’élevage, la charge en vibrio augmente, à la fois pour les plaques (lots) ayant subit ou pas des épisodes de mortalité.
Soletchnik Patrick, Geairon Philippe, Le Moine Olivier, Robert Stephane (2012). Effets de facteurs environnementaux (émersion, ressource alimentaire, ...) sur la survie de naissains d'huîtres creuses dans les pertuis charentais. Ref. R. INT. ODE/LER/LERPC 2012. https://archimer.ifremer.fr/doc/00084/19478/