Pinnatoxines en lien avec l’espèce Vulcanodinium rugosum

Suite à la découverte de la Pinnatoxine G comme agent responsable des toxicités atypiques à Ingril fin 2010, une étude a été commanditée afin d’approfondir les connaissances sur l’organisme producteur de cette toxine, Vulcanodinium rugosum, les toxines associées et leur toxicité. L’organisme, étant considéré « cryptique » dû à sa faible présence dans le milieu, a été suivi de manière plus proche à Ingril. Il est apparu dans la colonne d’eau en juillet et août 2012, et quelques échantillons ont pu être prélevés pour la mise en culture de souches supplémentaires. Une corrélation directe entre la croissance de l’organisme et la température est soupçonnée mais n’a pas encore pu être corroborée sur la période d’étude, faute d’un nombre suffisant d’échantillons. La salinité a été relevée comme étant potentiellement un autre facteur affectant la prolifération de cet organisme. La Pinnatoxine G purifiée a pu être obtenue auprès de collaborateurs néozélandais par le biais du CNRC Halifax. Les collaborateurs du CNRC ont caractérisé ce produit comme étant pur, et une solution d’étalon a été produite. La stabilité de cette solution a été testée, et l’étalon étant très stable a pu être utilisé pour l’analyse des échantillons par spectrométrie de masse. Une méthode analytique a été mise en place pour l’analyse des différents analogues de la Pinnatoxine et des Ptériatoxines (A à G et PtTX-A à C). Les facteurs de réponse des autres analogues sont supposés égaux à 1. L’analyse des pinnatoxines à Ingril clarifie que la Pinnatoxine G est l’analogue le plus abondant avec un faible pourcentage de la Pinnatoxine A (connu pour être un métabolite de la Pinnatoxine G produit par le coquillage). Les concentrations varient fortement d’année en année, mais les concentrations maximales ont dépassé 600 µg kg-1 pour les trois ans 2010 à 2012 et ont dépassé 1200 µg kg-1 en 2010. Ainsi, Ingril présente les concentrations les plus élevées mondialement, dépassant d’un facteur six les plus fortes teneurs rapportées (Nouvelle Zélande). La comparaison entre moules et palourdes montrent que les moules accumulent la Pinnatoxine G toujours de manière préférentielle, et que la moule reste donc l’espèce sentinelle par excellence. Les palourdes ont une très légère tendance à métaboliser plus largement ce composé, le pourcentage de PnTX-A constituant 1.9% de la Pinnatoxine G dans les palourdes par rapport aux 1.1% dans les moules. La culture en masse de l’organisme a été réalisée en mode batch dû à l’adhérence notoire des cellules aux parois des contenants des cultures. Différents facteurs environnementaux et nutritionnels ont été examinés pour leurs effets sur la croissance et la production toxinique de l’organisme. La salinité, les sources d’azote et potentiellement la température sont des facteurs à respecter. Un total d’environ 290 g de masse algale a été produit à partir de 350 litres de cultures. Cette biomasse contenait 3,1 mg de Pinnatoxine G. Bien que l’étude fût coûteuse dû au temps agents passé, elle permettrait de produire de la biomasse suffisante pour la préparation durable d’étalon. Aucune toxicité cellulaire de la Pinnatoxine G n’a été obtenue sur les trois modèles cellulaires utilisés (Caco2, Neuro2a et KB), dans les conditions testées. Toutefois, les extraits bruts de Vulcanodinium rugosum se sont révélés être très toxiques sur ces modèles. De plus, même si la toxine pure n’interfère pas avec l’intégrité de la barrière cellulaire (modèle de la barrière intestinale), elle passe aisément à travers cette barrière sur une exposition de 24 h. Cette observation est en cohérence avec une étude qui a été conduite par un groupe néozélandais qui a examiné la toxicité orale dans le modèle souris. Cette étude a été examinée de près par nos collaborateurs et des pistes pour confirmer et approfondir ces résultats ont été indiquées. Le manque de données épidémiologiques pourrait être relié à l’absence de récolte des moules dans l’étang d’Ingril pour la consommation humaine.

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Pinnatoxines et Vulvanodinium rugosum
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Comment citer
Hess Philipp, Herve Fabienne, Abadie Eric, Sechet Veronique, Molgo Jordi, Amzil Zouher, Fessard Valerie (2012). Pinnatoxines en lien avec l’espèce Vulcanodinium rugosum. Ref. R.RBE/EMP/PHYC 12-05. https://archimer.ifremer.fr/doc/00094/20518/

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