Etude épidémiologique et écopathologique dans le cadre des mortalités de naissains d'huîtres creuses, Crassostrea gigas
Dans le cadre d’une convention Ifremer-DGAL (2010-2011), une étude épidémiologique et écopathologique intégrative a été conduite en Rivière de Pénerf (Morbihan). Elle a permis de mettre en place un outil d’objectivation pour i) l’évaluation des mortalités par une enquête réalisée auprès de tous les professionnels et pour ii) l’acquisition de données sur la biomasse, les stocks présents (élevés et non élevés) et la bathymétrie du site. Une régression logistique multivariée a permis d’ajuster la relation entre ces variables explicatives et d’étudier toutes leurs combinaisons pour comprendre les différences de mortalité déclarées sur les lots de naissains analysés. Le meilleur modèle prend en compte l’origine du naissain (écloserie, naturel), la date de transfert, la densité d’élevage et le secteur d’élevage. L’amélioration du parcours zootechnique peut permettre un gain moyen de survie de 20 à 30%.
Ce type d’étude ne permettant pas de suivre l’évolution spatio-temporelle des mortalités et le suivi pathologique des lots, des expérimentations complémentaires ont été menées en 2010 et 2011. Elles montrent que la mortalité présente un pic majoritaire au cours de l’été et que ce pic peut être suivi de un ou de plusieurs rebonds de mortalité d’intensité moins importante sur la période de juin à septembre 2010 et 2011. Ces pics successifs de mortalité sont associés à la présence du virus OsHV1µvar, sa concentration dans les tissus de naissains et dans l’eau de mer. L’hypothèse d’une aggravation des mortalités par la présence chronique dans les naissains de la bactérie Vibrio splendidus et/ou de toxines excrétées dans l’eau de mer ne peut être rejetée. Toutefois, nous ne disposons pas aujourd’hui de donnée sur les interactions éventuelles entre ces deux agents infectieux. D’autre part, les quelques cas de lots infectés par V. aestuarianus sont loin d’expliquer à eux seuls les mortalités en Rivière de Pénerf.
La concentration virale dans les naissains et dans l’eau semble un facteur prédominant de mortalité. L’ensemble de nos résultats, y compris l’observation de rebonds de mortalités, suggère que toute pratique augmentant la charge virale, par exemple, l’introduction de naissains contaminés ou en cours de mortalité à différentes périodes de l’année, pénalise l’ensemble des professionnels d’une zone d’élevage accueillant des transferts.
Enfin, la partie conceptuelle d’un modèle dynamique de diffusion de la surmortalité, à l’échelle d’une population, a été élaborée pour mieux comprendre les mécanismes impliqués. Les données acquises par les expérimentations réalisées en 2010 et 2011 permettront d’enrichir et de valider le modèle. L’objectif final à moyen terme sera de tester différents scénarii de gestion du risque en vue de prédire certains effets bénéfiques ou non pour la conchyliculture.