Expression de gènes viraux de l'herpès virus OsHV-1 sous sa forme µVar chez l'huître creuse, Crassostrea gigas
Le premier cas d'infection à virus de type herpès a été rapporté en 1972, aux Etats Unis, chez l'huître américaine, Crassostrea virginica (Farley et al, 1972). A partir de 1991, des mortalités massives associées à la détection de virus de type herpes ont été observées chez plusieurs espèces de bivalves marins, à différents stades de développement (essentiellement chez les larves et le naissain) et dans différentes régions du monde. Sur la base d’observation en microscopie électronique à transmission, ces virus présentaient des caractéristiques morphologiques identiques à celles des Herpesvirus (Roizman, 1982).
Les connaissances acquises concernant la taille, la structure et le séquençage du génome d’un virus infectant les larves d’huîtres creuses en France ont confirmé l'hypothèse que ce virus, appelé Ostreid herpesvirus 1 appartient à l’ordre des Herpesviales et à la famille des Malacoherpesviridae (Le Deuff & Renault, 1999 ; Davison et al., en 2005 ; Davison et al., 2009). Le séquençage complet a montré que la structure de l'ADN viral est comparable à l'herpès simplex virus de type 1, HSV-1. La taille du génome d'OsHV-1 est estimée à 207 kpb et comprend de 124 cadres de lecture (ORFs).
Depuis 2008, des épisodes de surmortalités ont été rapportés dans différentes régions de production d’huîtres creuses, C. gigas, en France, en Irlande et au Royaume Uni. Les données disponibles suggèrent que le virus est une cause prépondérante avec la détection un génotype viral particulier, appelé OsHV-1 µVar à partir de 2008 (Segarra et al. 2010). Bien que les facteurs climatiques seuls n’apparaissent pas comme une cause suffisante pour expliquer le phénomène, les surmortalités sont bien saisonnières en termes d’apparition. Une augmentation rapide de la température de l’eau au printemps a été clairement identifiée comme un facteur de risque majeur.
Pour diminuer les effets de ce virus, les moyens de lutte sont relativement restreints. Au vue des conditions d'élevage des huîtres en milieu ouvert, l'utilisation de traitements médicamenteux reste inadaptée. De plus, l'absence de mémoire immunitaire chez les invertébrés ne permet pas d'utiliser la vaccination pour combattre l’infection virale. Ainsi, les moyens de lutte reposent essentiellement sur (1) la surveillance des stocks et des transferts afin de limiter la propagation de la maladie et (2) sur le développement d'animaux résistants à l'infection se traduisant par une meilleure survie.
Ces différentes approches nécessitent des outils de diagnostic adaptés, une bonne connaissance du cycle viral, et plus particulièrement des interactions entre l’hôte, le virus et l’environnement.
Dans ce contexte, il apparaît indispensable de mieux connaître l'expression des gènes viraux au cours de l'infection chez l'huître creuse, Crassostrea gigas.
Il a été choisi de suivre l’expression de gènes viraux lors d’une infection expérimentale. En effet, très récemment, Schikorski et al. (2011) ont développé un protocole d’infection expérimentale rendant possible la reproduction de l'infection virale en laboratoire chez le naissain d'huîtres creuses. D'autre part, le séquençage complet d'OsHV-1 (Davison et al., 2005) permettait de sélectionner des gènes d’intérêt ( 41 gènes candidats). Afin d'étudier la cinétique d'expression des gènes sélectionnés, la PCR en temps réel à été optimisé pour chacun couple d'amorces.
La présente étude a été réalisée chez des huîtres de moins d’un an appartenant de 2 familles présentant un comportement contrastées en terme de résistance à l’infection en condition expérimentale : une famille résistante (10% de mortalité 6 jours post infection) et une famille sensible (100% de mortalité 3 jours post infection). Suite à l'infection, un fragment de manteau a été prélevé sur 12 individus pour chaque condition et chaque temps de prélèvement. Les temps de prélèvements post injection sélectionnés étaient : 0h, 4h, 8h, 12h et 26h.
Les premiers résultats obtenus en PCR en temps réel mettent en évidence la détection de gènes très précoces mais également plus tardifs. Dans cette étude, après 26h d'infection, les 41 gènes viraux semblent tous être exprimés chez la famille sensible. Ainsi, l'expression des gènes d'OsHV-1 semble avoir une cinétique similaire à ceux des herpesvirus de vertébrés. En effet, l’expression des gènes viraux chez les herpersvirus comporte trois phases au cours de l’infection : (1) des gènes sont exprimés très précocement avec synthèse de protéines activatrices, (2) d’autres gènes précocement avec la synthèse d’enzymatiques impliquées dans la réplication dont l'ADN polymérase et (3) et enfin un troisième groupe de gènes tardivement avec la synthèse des composants protéiques de la capside et des glycoprotéines d'enveloppe.
Ainsi, cette étude a permis de détecter la présence d'ARN transcrits durant une infection expérimentale à OsHV-1 chez le naissain d'huître creuse Crassostrea gigas. Enfin, ceci confirme la réplication du virus au sein même de son hôte et par conséquent renseigne sur le cycle de vie viral d'OsHV-1.