125000 ans d'enregistrements récifaux des stagnations du niveau de la mer dans l'Océan Indien (Archipel des Glorieuses)
Suite à l’initiation du programme REEFCORES (REEFs and CORals form the EparseS), deux missions menées en 2011 et en 2013 dans l’Archipel des Glorieuses (Nord Madagascar) ont permis de documenter les empreintes des épisodes de déglaciation dans la morphologie des terrasses récifales émergées et submergées. L’objectif principal de cette étude est d’abord de documenter les stagnations du niveau marin qui ont été engendrées au cours de la dernière remontée du niveau marin et sur les terrasses du dernier interglaciaire (MIS 5e). Cette zone située autour des Seychelles, du fait de sa stabilité (isostasie très faible), est idéalement placée pour reconstituer avec précision les variations globales du niveau marin (Milne and Mitrovica, 2008). Des données de bathymétrie Lidar (Programme Litto3D) et multi-faisceaux (SHOM) couplés à une analyse sédimentologique détaillée ont été utilisées pour bâtir une carte morpho-sédimentaire de l’archipel. Des coupes d’affleurement de récifs fossiles ont été levées en 2011 et 2013, et des profils de sismique Sparker ont été acquis en 2013 depuis les zones peu profondes d’arrière récif jusqu’au rebord de plate-forme (-150m). L’Archipel des Glorieuses est composé d’un avant récif et d’une barrière récifale développés du côté haut vent, d’un apron, d’une plate-forme interne (<15 m de profondeur) et externe (entre 15 m et 25 m de profondeur), ainsi que de quatre îlots émergés. Des formations récifales fossiles datant du dernier interglaciaire forment des éperons rocheux localisés entre +3m et +5m au-dessus du niveau marin actuel. Ces formations fossiles montrent des successions de séquences récifales qui sont par endroit affectées par des cavités karstiques. L’élévation actuelle de ces terrasses datant de l’Eemien démontre de la faible subsidence de l’édifice volcanique sur lequel repose l’archipel.
Le rebord oriental de la plate-forme est composé d’une succession de terrasses ennoyées. Ces terrasses sont caractérisées soit par des encoches dans le profil de pente, soit par des plateaux large de quelques centaines de mètres, recouvert ou non de sédiments ou de formations récifales fossiles. Une terrasse à -120m reliée à une surface d’érosion remontant vers la plateforme est interprétée comme la surface régressive glaciaire. Des constructions récifales, initiées sur une terrasse à -80m, pourraient correspondre au début de la remontée du niveau marin (vers 19 000 ans). Une terrasse à -60m est recouverte par un prisme sédimentaire stratifié épais de 10 m. Des petites constructions récifales couvrant le toit de cette unité composent le substrat d’une dernière terrasse située à -45 m. La position de cette dernière pourrait être l’expression de la fin de dernière remontée du niveau marin, vers 10000 ans. Des perspectives futures de forages sur les terrasses ennoyées permettront de dater précisément l’âge de leur mise en place. Ces données devraient permettre de bâtir une courbe de la dernière remontée du niveau marin, qui n’est pas encore documentée dans l’Océan Indien. Les amplitudes de variation ainsi que les vitesses de remontée durant les événements extrêmes (« meltwater pulses ») pourront être comparées avec les résultats obtenus dans les océans Atlantique et Pacifique (Fairbanks et al., 1989; Bard et al., 1996; Bard et al., 2010; Deschamps et al., 2012).
Jorry Stephan, Jouet Gwenael, Le Roy Pascal, Prat Sophie, Camoin Gilbert, Vella Claude, Caline Bruno (2013). 125000 ans d'enregistrements récifaux des stagnations du niveau de la mer dans l'Océan Indien (Archipel des Glorieuses). Volume des résumés du 14ème congrès Francais de Sédimentologie. p.212. https://archimer.ifremer.fr/doc/00202/31279/