Etude de la qualité des captures de la pêcherie associée aux DCP ancrés. Projet MAGDELESA
La qualité des produits est un élément du développement durable des pêcheries, car elle vise à garantir la fiabilité sanitaire des débarquements et leur valorisation optimale. Dans le cas de la pêche associée aux DCP ancrés, les embarcations non pontées utilisées pour la capture de grands poissons pélagiques ne sont pas de dimension suffisante pour être équipées de moyens de conservation adéquats (règlementaires) des prises. Cette étude permet, à partir d’embarquements en mer, de suivi des prises et d’analyse des chairs, de faire un point complet des pratiques et de leurs effets sur la qualité des produits de la pêche associée aux DCP ancrés.
Plusieurs protocoles de traitement post capture sont mis en œuvre par les pêcheurs en fonction de leur connaissance, de la dimension des prises ou des moyens dont ils disposent à bord de leur embarcation. Les observations en mer montrent que la décérébration, la saignée et l’éviscération des poissons ne sont pas toujours effectuées et qu’elles ont une conséquence sur les qualités organoleptiques des produits. L’embarquement de glace paillette est actuellement généralisé dans certaines îles où elle est disponible. Cependant, les compartiments réfrigérés ou glaciaires embarquées ne permettent pas de stoker les plus gros poissons. Ceux-ci sont alors souvent refroidis au mieux avec des quantités variables de glace permettant de descendre la température mais pas en-dessous de 5 ou 15° C pendant la durée de la marée (6 à 8 heures). Dans certains cas le poisson doit être laissé dans le fond de l’embarcation. Il est alors protégé du soleil à l’aide d’une toile et rafraichi régulièrement à l’aide d’eau de mer. Dans ce cas les enregistrements de température de surface du poisson montrent une élévation de la température jusqu’à 35 ° C et celle-ci ne descend pas en-dessous de 25 ° C.
Les analyses microbiennes sur des échantillons prélevés au débarquement révèlent une contamination (coliformes) liée à l’application insuffisante des règles d’hygiène. Les analyses chimiques en liaison avec la fraicheur des produits montrent l’importance de saigner et d’éviscérer les poissons afin d’éviter la production d’histamine. Ce traitement post capture permet aussi de préserver la couleur de la chair sur une durée plus longue. L’absence de manche à eau sur les petites embarcations ne permet cependant pas de réaliser cette opération dans de bonnes conditions. La nécessité de procéder à la démédullation des poissons après leur capture est soulignée, afin d’éviter l’apparition du syndrome de chair brûlée. Cette opération qui peut provoquer une agitation du poisson est difficilement réalisable par une personne sur une petite embarcation.
La composition chimique de la chair des poissons analysés (thons et marlin bleu) a mis en évidence qu’il s’agit de poissons maigres avec un fort taux de protéines et peu de lipides.
L’identification sommaire de certaines familles de parasites rencontrées dans la chair des poissons conduit à conseiller une congélation à cœur pendant 24 h à – 20 ° C avant toute consommation en cru ou légèrement cuit.
Les contaminants analysés dans la chair des poissons capturés à proximité de DCP ont une teneur inférieure à celle fixée par les règlements européens pour les PCB et dioxines. Les taux de métaux lourds mesurés sont également en dessous des normes, sauf pour un marlin bleu dans le cas du cadmium et 2 individus (un thon noir et un marlin bleu) pour le mercure total. La chloredécone analysée dans environ 150 échantillons de thons noir et jaune et de marlin bleu a toujours révélé une conformité de ces produits avec des taux inférieurs à 20 µg par kg de chair.
Les travaux sur la durée de vie des produits ont mis en évidence une conservation maximale sous glace de 6 jours, et de 10 jours grâce à un emballage sous atmosphère modifiée. Mais avec ce dernier procédé une décoloration des produits apparaît au bout de 7 jours. Le meilleur compromis est obtenu par une conservation sous vide en chambre froide +4°C. Les produits peuvent ainsi être conservés entre 7 et 10 jours sans qu’aucune décoloration ne soit observée.
Les échanges entre scientifiques, pêcheurs et gestionnaires ont mis l’accent sur l’importance d’une approche globale de la question de la qualité des produits de la mer. Les pêches à petite échelle n’ont pas les moyens de suivre les migrations des poissons. Leurs débarquements sont par conséquent irréguliers (fonction de la présence des poissons à proximité) et de faible quantité, ce qui les rendent peu compétitives par rapport aux pêches à grande échelle qui alimentent l’importation des produits de la mer, en particulier dans certains pays insulaires. La durée courte des marées et les techniques de pêche utilisées (ligne à main) donnent aux petites pêches l’atout de pouvoir débarquer des produits frais de qualité exceptionnelle, à condition que celle-ci soit préservée et bien valorisée. Pour cela, une adaptation de la filière de traitement et de conservation des captures de la pêche autour des DCP doit être faite à tous les niveaux et auprès de l’ensemble des pêcheurs afin d’éviter que les négligences des uns ne rejaillissent sur l’image de la profession. La réussite d’une telle opération passe par la création d’un poste de coordinateur qualité des actions de formation, d’équipement des points de débarquement et de commercialisation, de mise au point des pratiques adaptées aux moyens dont disposent les pêcheurs et d’élaboration d’un guide à destination des professionnels de la pêche et de la vente, d’amélioration des embarcations en relation avec les chantiers naval, d’information du consommateur sur les critères de qualité des produits de la mer et des exigences associées, etc. Ce travail nécessite une bonne connaissance théorique de la qualité des produits de la mer (aspects scientifiques et règlementaires) mais aussi une expérience des pratiques actuelles et des contraintes qui les conditionnent.
Mot-clé(s)
DCP ancré, Qualité des produits, Pêche artisanale, Développement durable
Product quality is an element of sustainable development for fisheries because it guarantees the safety and quality of landings, as well as optimal uptake. Where FADs fishing is concerned, open boats used for the capture of large pelagic fish are not big enough to be equipped with sufficient (regulatory) catch preservation equipment. In collaboration with boats at sea, this study has made it possible to monitor landings and fish flesh analysis and to review fishing practices and their subsequent impact on the quality of FADs fishing products.
Several post-capture treatment protocols have been implemented by fishermen based on their professional knowledge, the size of the catch or the facilities at their disposal on the boats. Observations at sea have shown that décérébration, bleeding and gutting of the fish are not always carried out, and that this has an adverse effect on the organoleptic quality of the products. The use of crushed ice is currently widespread on the islands where it is available. However, refrigerated compartments and coolers used on board make it impossible to store the largest fish. Consequently, during the catchload (6-8 hours), variable quantities of ice are used chill fish to temperatures ranging between 5°C and 15°C at best. Sometimes, the fish have to be stored at the bottom of the boat to be protected from the sun and kept cool using seawater. In this type of situation, the skin surface temperature of the fish shows readings between 24°C and 35°C, but never below.
Microbial analysis of samples taken from these landings reveal coliform infection due to insufficient standards of hygiene. Chemical analysis to determine the freshness of the products illustrate the importance of bleeding and gutting to prevent the production of histamine. This post-capture treatment also helps to preserve the colour of the flesh over a longer period of time. However, small boats without hosepipes are not able to carry out this operation in the most optimal conditions. The importance of demedullation of captured fish is highlighted in order to avoid "Burnt Tuna Syndrome". But since it is a procedure that can cause the fish to become agitated, it is not reasonably practicable for a sole individual on a small boat.
The chemical composition of the fish flesh analysed (tuna and blue marlin) shows that it involves lean fish, high in protein and low in lipids. In view of the family of parasites cursorily identified in fish flesh, deep-freezing for 24 hours at -20° C is recommended before consumption of raw or partially cooked fish. The analysis of the contaminants found in the flesh of fish caught in the vicinity of the FADs showed that the levels of PCB and dioxins were lower than those fixed by the European regulations. Levels of heavy metals were also below the norms, except for cadmium in blue marlin and total mercury in 2 specimens (black tuna and blue marlin). Chlordecone levels of under 20 ug per kilogramme of flesh were consistently achieved after analysis of approximately 150 samples of black tuna, yellow tuna and blue marlin.
Research on the shelf-life of these products has shown maximum preservation duration of 6 days under ice and 10 days using modified atmospheric packaging. However, this method brings about colour changes after approximately 7 days. The best compromise is obtained using ice in conjunction with vacuum packaging. In this way, goods can be preserved for 7 to 10 days without suffering from discoloration.
Discussions between scientists, fishermen and managers have highlighted the importance of having a global approach where the quality of seafood products is concerned. Small-scale fisheries are not in a position to be able to follow fish migrations. Consequently, their landings are irregular (depending highly on the presence of fish in the vicinity) and are small in quantity. This in turn means that these companies become increasingly uncompetitive against the large-scale fisheries, who automatically become the suppliers for the importation of seafood, particularly in certain small island countries. However, short catchloads and fishing techniques (handline trawls), mean that small-scale fisheries are at an advantage of being able to land fresh fish of exceptional quality, provided of course it is preserved properly and marketed efficiently.
For this to be achieved in FADs fishing, it is necessary to bring about changes in the treatment and preservation sectors, changes that need to be made on every level and for all fishermen, so as to ensure that the negligence of a few individuals does not tarnish the reputation of a whole industry.
Success of such an operation would entail initiatives such as creating job openings for Quality Control Training Coordinators, providing landing and marketing facilities, developing practices adapted to the means available to the fishermen, publishing a practical guide for professionals in the fishing & marketing industry, improving fishing vessels in conjunction with shipyards, providing consumer information on seafood quality standards and requirements etc.
This undertaking requires not only a good theoretical knowledge of seafood quality (both the scientific and reglementary aspects of it), but also an insight of current practices and the constraints which impact them.
Keyword(s)
Anchored FADs, Products quality, Small scale fishing, Sustainable development
Dromer Clément, Eugene Sonia, Régina Françoise, Reynal Lionel, Etienne Monique, Mathieu Heloïse, Pau Cedric (2015). Etude de la qualité des captures de la pêcherie associée aux DCP ancrés. Projet MAGDELESA. Ref. R.INT.RBE/BIODIVENV 2015-2. Ifremer. https://archimer.ifremer.fr/doc/00295/40636/