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L’huître creuse, sentinelle de l’état de santé des écosystèmes côtiers exploités du littoral français. Rapport annuel ECOSCOPA 2016
Occupant une place de premier ordre dans nos paysages côtiers, l’ostréiculture est le premier contributeur de la filière aquacole française avec une production estimée à 85 000 tonnes ces dernières années. Véritable espèce ingénieur, l’huître creuse joue aussi un rôle essentiel sur le plan écologique dans les écosystèmes qui l’abritent.
Pourtant, depuis plusieurs années, l’ostréiculture subie une baisse de production et les bancs naturels, garants de la diversité génétique, sont mis en danger. Ces phénomènes sont la conséquence directe de l’épizootie causée par OsHV-1 µVar frappant les naissains et des mortalités d’adultes associées à la bactérie Vibrio aestuarianus. Ces épisodes de mortalités accrues ne sont pas nouveaux mais leur récurrence et leur intensité nous amènent à élaborer des outils plus complets permettant de mesurer objectivement, par différents moyens et à plusieurs échelles, l’état de santé des huîtres, leur susceptibilité aux infections et l’impact des variations environnementales et/ou anthropiques sur leur cycle de vie (reproduction, écologie larvaire, recrutement, croissance). Ces outils doivent permettre de mieux évaluer sur le long terme les risques biologiques encourus par la filière (risques associés aux transferts, aux évolutions des pratiques culturales, ainsi qu’à l’émergence potentielle de nouvelles maladies).
Dans la mesure où l’élevage de l’huître creuse est, pour la quasi-totalité du cycle, réalisé en milieu naturel, ces outils font nécessairement appel à des systèmes organisés d’observation sur le long terme et à grande échelle (afin d’appréhender la diversité des écosystèmes exploités).
L’objectif général du projet ECOSCOPA est donc de continuer à consolider le dispositif d’observation actuel sur 6 écosystèmes, créé antérieurement par les projets RESCO et Velyger, et d’y ajouter progressivement une série de nouveaux indicateurs physiologiques et environnementaux pertinents, contribuant à une analyse plus fine des écosystèmes conchylicoles et leur évolution en lien avec les pressions climatiques et anthropiques.
Le rapport ci joint présente donc de façon successive : (1) les suivis 2016 des paramètres environnementaux sur 6 sites ; (2) les données du réseau Velyger sur la reproduction de l’huitre sur ces mêmes sites et (3) le développement d’un nouveau descripteur : la mesure de la protéine VDAC, appliquée sur des animaux sentinelles du projet.
Concernant les facteurs environnementaux et le cycle de reproduction 2016, on retient les faits majeurs suivants :
· Sur le plan hydro-climatique, cette année se caractérise par un hiver doux et un printemps dans les normales, suivis d’un été là aussi très proche des normales à une exception près : la rade de Brest qui a bénéficié d’une température de l’eau supérieure aux normales dés le début de l’été. Compte tenu d’une pluviométrie plutôt excédentaire, les concentrations en phytoplancton sont restées à des niveaux assez élevés de la rade de Brest aux pertuis charentais et toujours déficitaires dans le bassin d’Arcachon et la lagune de Thau.
· En terme de biologie, ces conditions hydro-climatiques se sont traduites, chez les populations d’huîtres adultes, par des indices de condition, proxy de la fécondité, assez élevés, avec toujours l’existence d’un gradient nord-sud observé chaque année, corrélativement à la concentration en phytoplancton. En outre, l’absence d’excédent thermique au printemps et en début d’été n’a pas permis de pontes précoces (à l’exception de la lagune de Thau), elles ont même été plutôt tardives (e.g. bassin d’Arcachon) et plutôt asynchrones. Les quantités de jeunes larves sont donc restées faibles (pic < 100 000 larves/1.5m3) sur les écosystèmes étudiés.
· Sur la façade atlantique, les températures de l’eau lors du développement larvaire des principales cohortes ont été tout justes dans les normes, voire un peu faible en août. En conséquence, il y a donc eu peu de larves grosses dans l’eau à l’exception des secteurs rade de Brest et lagune de Thau : avec, en moyenne sur l’été, moins de 10 larves grosses/1,5m3, certains secteurs enregistrent leur score le plus faible depuis le début des suivis.
· La lagune de Thau fait aussi figure d’exception : les températures élevées tout au long de l’été ont permis une concentration moyenne de larves ‘grosses’ modérée (243 larves/1,5m3). Cependant, les méthodes et les techniques de captage sont encore en cours d’optimisation sur ce secteur et cette année, malgré la présence de larves grosses, le captage est resté faible (< 10 naissains par coupelle à l’automne).
· En conséquence, l’année 2016, se caractérise par un captage globalement « faible à modéré » dans tous les secteurs s’échelonnant autour de 1 naissain/coupelle en baie de Bourgneuf à plus de 114 naissains/coupelle dans certains secteurs de rade de Brest (secteur de Landévennec-Poulmic).
Concernant le développement d’un nouveau descripteur physiologique, les analyses présentées ici ont permis de développer un protocole de quantification d’un biomarqueur de l’effet Warburg de l’huître et d’étudier la corrélation entre ce biomarqueur et les mortalités d’huître in situ. L’effet Warburg, bien détaillé chez les Vertébrés, correspond au mauvais état de santé de l’huître lorsqu’elle est susceptible au virus OsHV-1, peu de temps avant qu’elle n’y succombe. Le biomarqueur développé ici semble prédictif de la mortalité ou non par infection virale in situ. Nos recherches futures viseront à étudier comment le contenu de VDAC est régulé par les facteurs environnementaux, facteurs qui sont certainement très variables en fonction des sites ECOSCOPA.
Emprises
49.985785N, 42.721928S, 4.921875E, -5.976563W
Texte intégral
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Version officielle éditeur | 57 | 3 Mo |