Contribution à l'étude de l'adaptation à l'eau de mer chez les Poissons Salmonidés - Détermination de critères de smoltification par mesures de l'activité (Na+K+)-ATPasique des microsomes de la branchie et des hormones thyroïdiennes plasmatiques

Les salmonidés peuvent être classés en deux grands groupes :
- ( 1) les espèces ou variétés "sédentaires" d'eau douce, non affectées par un comportement migratoire et passant leur vie entière en systèmes dulçaquicoles ;
- (2) les especes ou variétés affectées par de profondes modifications physiologiques, la smoltification, les préadaptant à la vie en milieu océanique et se terminant par la migration active vers la mer.
Le présent travail a consisté à effectuer des transferts d'eau douce en eau de mer de diverses espèces de ces deux groupes à différentes étapes de leur cycle de développement et à étudier corrélativement les variations consécutives de leur équilibre hydrominéral et leurs performances ultérieures. Les résultats de cette étude ont permis d'aboutir aux conclusions suivantes :
Certaines espèces du groupe (1) peuvent supporter un transfert en eau de mer (>34%o de salinité) et s'adapter à ces nouvelles conditions mais en présentant dans tous les cas un déséquilibre plus ou moins intense et plus ou moins prolongé de leur balance hydrominérale (étudiée au travers de l'évolution de la pression osmotique, de la natrémie et de la chlorémie) avant de parvenir à réguler correctement leur milieu intérieur. Elles pourront être transférées en eau de mer (dans une plage thermique favorable de 5 à 14°C) mais à taille et poids importants (>110 g pour la truite arc-en-ciel, >60 g pour la truite fario). Les  représentants du groupe (2) supporteront parfaitement le contact avec l'eau salée, à taille et poids plus faibles (>20 g pour le saumon coho ; >30 g pour le saumon atlantique), mais seulement s'ils sont transférés aux époques de la smoltification. Le smolt s'adapte rapidement sans déséquilibre hydrominéral (ou très limité après un passage direct à 35 %o ) et maintient une très forte croissance alors que le parr d'eau douce est incapable de s'adapter à la salinité élevée (très fort déséquilibre osmotique et ionique du plasma sanguin ; blocage total de la croissance ; mort de l'animal). Les variétés ou espèces à smoltification présentent une augmentation saisonnière de l'activité (Na+ -K + )-ATPasique des microsomes de la branchie alors qu'elles sont en eau douce, et il a été mis en évidence que c'est seulement à haut niveau enzymatique qu'elles sont réellement smolts et capables des meilleures possibilités d'euryhalinité et d'adaptation au milieu marin. Il apparaît une relation directe pour toutes les espèces étudiées (saumon coho, saumon atlantique, truite de mer, truite steelhead) entre le niveau enzymatique initial et le niveau de régulation osmotique et ionique à court et moyen terme après le transfert en eau de mer, puis par la suite avec la survie et  la croissance à long terme. La smoltification implique de profondes modifications internes et pas seulement pour la fonction d'osmorégulation et les hormones thyroïdiennes (thyroxine ou T4 et triiodo-thyronine ou 3) apparaissent fortement impliquées dans le phénomène. Un intense pic de T4 plasmatique se produit en cours de smoltification, précédent de 1 à 3 semaines le maximum de (Na + -K + ) - ATPase branchiale. Deux augmentations de T3 encadrent le haut niveau de T4 chez le saumon atlantique. Ces faits sont synchronisés par les facteurs du milieu (température et photopériode surtout) et le moindre problème environnemental ou pathologique cree des perturbations pouvant entraîner l'apparition de "multi- pics " de T4 et de T3 comme nous l'avons obtenue une année. Des relations directes entre les niveaux absolus de T3 ou de T4 et la taille des individus apparaissent, particulièrement en période de pré- smoltification, et soulignent l'intervention des hormones thyroïdiennes (HT) dans le phénomène de croissance. Ces relations disparaissent au moment où se produit le haut niveau de T4 chez les smolts. Les HT paraissent aussi jouer un rôle dans l'acquisition de l'euryhalinité pour divers auteurs, mais pour d'autres ce fait n'est pas évident: nos résultats démontrent qu'après le pic de T4, le saumon atlantique est très euryhalin et peut s'adapter à l'eau de mer instantanément sans déséquilibre hydro-minéral, mais il n'apparaît pas de corrélation ensuite entre niveau absolu de T4 et capacités d'osmorégulation en milieu marin. Le contact avec l'eau salée affecte peu les niveaux de T4 et a parfois tendance à diminuer ceux de T3. Dans une optique de recherche finalisée la mesure de l'activité (Na + -K + ) - ATPasique des microsomes de la branchie chez les salmonidés d'eau douce reste le meilleur critère d'appréciation des capacités d'osmo- et d'ionorégulation après transfert en mer chez les espèces à smoltification et son étude est très précieuse en système d'aquaculture intensive, alors qu'en système extensif (pacage marin) il faut l'assortir de la mesure des HT circulantes, meilleures indicatrices du déclenchement de la phase finale de la smoltification, et du comportement migratoire.

Mot-clé(s)

Smoltification, Osmorégulattion, Salmonidés, Na+K+, ATPase, Pression osmotique, T3 triiodo-thyronine, T4 thyroxine, Croissance, Indicateurs physiologiques, Truite arc-en-ciel, Salmo gairdneri, Truite fario, Salmo trutta, Saumon de fontaine, Salvelinus fontinalis, Saumon coho, Oncorhynchus kisutch, Saumon atlantique, Salmo salar

Texte intégral

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Version officielle éditeur
38182 Mo
Comment citer
Boeuf Gilles (1987). Contribution à l'étude de l'adaptation à l'eau de mer chez les Poissons Salmonidés - Détermination de critères de smoltification par mesures de l'activité (Na+K+)-ATPasique des microsomes de la branchie et des hormones thyroïdiennes plasmatiques. PhD Thesis, Université de Bretagne Occidentale. https://archimer.ifremer.fr/doc/00443/55500/

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