Copier ce texte
MORPHOSEINE. Modélisation de l’évolution morphosédimentaire de l’estuaire de la Seine
L'embouchure de l’estuaire de la Seine a subi de fortes altérations morphosédimentaires au cours du dernier siècle et son évolution se poursuit encore actuellement. La question du devenir du système et des habitats associés est donc posée, en tenant compte d'éventuels changements environnementaux ou climatiques. La modélisation morphosédimentaire a pour ambition de simuler le devenir de la morpho-bathymétrie, en rendant compte des couplages entre processus hydrodynamiques, transports de sédiment et évolution de la morphologie. Le projet MORPHOSEINE vise à exploiter l'outil de modélisation MARS3D CurviSeine mis en place par l’Ifremer dans le cadre des programmes Seine-Aval (SA) 4 et 5, afin de répondre à l'attente concernant l'évolution possible de l'estuaire dans les 50 prochaines années. La « trajectoire » du système estuarien est déclinée sous plusieurs paramètres ou indicateurs, destinés à caractériser les habitats pélagiques et benthiques : i) distribution des salinités et des matières en suspension (MES), et ii) évolution morphologique, avec un regard particulier sur l'hypsométrie (évolution des zones subtidales et intertidales). La validation du modèle morphosédimentaire s’appuie principalement sur une période décennale actuelle bien documentée (2009-2018) et sur une période tendancielle (2016- 2026), pour lesquelles les tendances morphologiques simulées sont comparées avec une autre approche de modélisation mise en place par la société ARTELIA pour le compte du GPMH (TELEMAC3D-Seine). D’autre part, une tentative de reconstitution de l'évolution morphosédimentaire rétrospective (1975-1995) a été réalisée afin d’apporter une analyse critique sur des simulations prospectives à des échelles de temps plus longues (50 ans). D’importants développements ont été apportés au module sédimentaire MUSTANG (utilisé dans la configuration CurviSeine) pour améliorer le réalisme des simulations de dragages et des évolutions morphologiques à l’embouchure. Bien que la dynamique des MES soit dégradée pour les simulations morphodynamiques à l’échelle décennale (par rapport aux simulations annuelles réalisées dans le cadre du projet HYMOSED-SA5), les comparaisons hypsométriques et morphologiques sont dans l’ensemble satisfaisantes. De plus, la comparaison inter-modèles révèle certaines faiblesses et incertitudes à considérer, mais apporte également un certain degré de confiance dans la simulation des tendances morphologiques pour la plupart des zones de l’estuaire aval. L’analyse des simulations rétrospectives sur 20 ans (1975-1995) permet de mieux caractériser les évènements morphogènes de l’embouchure et de mettre en évidence l’influence des vagues et du marnage sur les évolutions morphologiques des zones subtidales et intertidales, alors que les apports fluviaux semblent moins déterminants. Les travaux de modélisation morphosédimentaire prospective à 50 ans se sont portés sur la comparaison de deux scénarios « extrêmes » de montée du niveau de la mer (RCP 2.6 : +3 mm/an et RCP 8.5 : +24/mm/an ; rapport du GIEC 2017). Les résultats révèlent que l’estuaire aval a la capacité de s’adapter à la montée du niveau moyen avec une accrétion globale de l’embouchure. Cette adaptation se traduit par des estrans moyens et supérieurs conservés après 50 ans. Il est donc important de noter que la montée du niveau de la mer n’est pas systématiquement associée à une perte des zones intertidales, en particulier si suffisamment de sédiments sont disponibles pour nourrir l’adaptation morphologique de l’estuaire. Les travaux de modélisation numérique conduits dans ce projet ont permis d’apporter une meilleure compréhension de la dynamique morphosédimentaire de l’estuaire à l’échelle de 10 à 50 ans. Néanmoins, la modélisation morphodynamique réaliste à l’échelle d’un estuaire (i.e. dynamique tridimensionnelle, sable-vase, vagues-courants, avec aménagements-dragages), est très complexe à mener et est rarement réalisée au-delà de 10 ans à cause de contraintes liées au temps de calcul et aux problèmes de stabilité numérique. Dans le cadre de la configuration CurviSeine, il reste encore de nombreuses pistes de travail pour améliorer le réalisme et la stabilité des simulations numériques, que ce soit sur les modules hydrodynamiques et sédimentaires ou sur la définition d’un maillage plus adapté pour répondre à différentes problématiques (ex. actions de restauration). Enfin, il faut réaliser que la modélisation morphosédimentaire estuarienne à moyen et longterme (10-50 ans) représente actuellement un réel défi scientifique. Il est essentiel de bien spécifier les objets d’étude et de connaître les capacités (forces/faiblesses) des outils numériques mis en oeuvre pour y répondre. Ce sera toujours en considérant ce rapport « confiance/incertitude » que nous pourrons aborder objectivement les réponses potentielles de l’estuaire face aux pressions climatiques et anthropiques.
Emprises
50.1N, 49.25S, 1.2E, -1.7W
Texte intégral
Fichier | Pages | Taille | Accès | |
---|---|---|---|---|
Version officielle éditeur | 97 | 18 Mo |