En 2018, dans un contexte climatique exceptionnel, la lagune de Thau a été impactée par une « malaïgue » causant des mortalités estivales massives puis par un phénomène d’eaux vertes, dominé par le picophytoplancton du genre Picochlorum durant l’automne 2018, entrainant un arrêt de croissance chez les huîtres. Inquiétés par le phénomène et les impacts engendrés sur la production, les acteurs locaux ont co-construit le projet de recherches « Overte » pour (i) mettre en place un suivi environnemental pour décrire ce phénomène et mieux le comprendre et (ii) mettre en évidence les interactions entre Picochlorum et les coquillages en élevage. Ce rapport aborde le second objectif. Ainsi une série d’expérimentations a été réalisée en février 2019 pour tester les capacités de différentes espèces et tailles de bivalves en élevage, à diminuer les abondances de Picochlorum par leur activité de filtration. Ces expériences ont été réalisées en laboratoire à l’aide d’une série de béchers contenant (i) 3 types de solutions (1L) : l’eau de la lagune de Thau contenant Picochlorum à 45,2 millions de cellules.L-1 (P) ou à 20,7 millions de cellules.L-1 (D) et une solution d’Isochrysis galbana ; (ii) en absence ou en présence de 5 types de bivalves : des huîtres creuses (Crassostrea gigas) de taille T6, T20 ou C3, des huîtres plates, Ostrea edulis, ou des moules méditerranéennes (Mytilus galloprovincialis). Une série de prélèvements d’eau a été réalisée au cours des 40 minutes d’incubation pour déterminer la variabilité temporelle des concentrations de picophytoplancton et de nanophytoplancton par cytométrie en flux. Cette étude a permis de démontrer qu’au contraire des huîtres creuses et des huîtres plates, les moules d’un poids moyen de 21,4 g sont capables de diminuer drastiquement les abondances de Picochlorum et ainsi de retenir près de 1 millions de cellules de Picochlorum par minute à 11,4°C. Ces résultats suggèrent que les 1228 tonnes de moules, mortes en 2018 avant l’efflorescence de Picochlorum, auraient pu participer au contrôle de l’efflorescence de Picochlorum si elles avaient survécu aux chaleurs et à l’anoxie. Au vu de ces résultats, il serait sans doute important d’assurer une gestion de stock des moules dans la lagune de Thau. Néanmoins il serait très important de récolter les moules en élevage avant les chaleurs estivales, pour éviter des mortalités massives telles que celles observées ces dernières années en lien avec le réchauffement climatique. Les perspectives de ce travail sont de tester les capacités de filtration des moules selon un gradient de température et de concentrations cellulaires pour déterminer le seuil de concentration à partir duquel Picochlorum ne serait plus ingéré et assimilé mais rejeté dans la colonne d’eau sous forme de pseudofécès.