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Rapport Alex Breizh. Impact des contrôles environnementaux sur la dynamique des efflorescences de l’algue toxique Alexandrium minutum en Rade de Brest. Modélisation en compétition interspécifique.
Depuis 2012, la rade de Brest a été l’objet de fermetures administratives de commercialisation de coquillages et de ramassage en raison des toxicités induites par le développement de la microalgue nuisible Alexandrium minutum. Le suivi terrain existant depuis 2009 à la Pointe du château (estuaire de la Mignonne, Daoulas) a été renforcé en 2016 dans le cadre de ce projet (AlexBreizh) afin de cerner la dynamique de croissance de cette microalgue en lien avec les facteurs environnementaux et la dynamique des autres espèces phytoplanctoniques. Ce suivi hebdomadaire de 12 années a permis de comprendre la dynamique saisonnière de cet environnement et sa variabilité interannuelle. Alexandrium minutum est observé uniquement dans la période qui s’étend d’avril à septembre et les maximums d’abondance sont en juin et juillet. Selon les années, le bloom démarre en mai (printemps chauds comme en 2014) ou juin (2013, printemps froid). La température de 15°C est l’indicateur du démarrage possible d’un bloom, ce qui a été aussi vérifié sur d’autres sites bretons. Les maximas sont liés aux conditions estivales de débits, de forts débits entrainant des apports conséquents en nitrates et phosphates qui stimulent la croissance d’A. minutum et lui permettent de dominer la flore phytoplanctonique. Ce fut le cas en 2012 où l’été a été exceptionnellement pluvieux. La communauté phytoplanctonique en hiver est au repos. A partir de mars on observe une succession écologique avec d’abord un développement du microphytoplancton alors que les concentrations en azote et phosphore du milieu sont élevées (débits hivernaux forts) suivi par le nanophytoplancton puis le picophytoplancton en été. A l’occasion de crues estivales, c’est à nouveau le microphytoplancton qui se développe. Ces mesures de l’ensemble de la communauté phytoplanctonique ont pu être réalisées dans AlexBreizh par l’utilisation de la cytométrie in situ. L’ensemble des données mesurées, intégré dans la base Quadrige2 et consultable par tous, a permis de tester différentes analyses afin de mettre en évidence des liens entre paramètres environnementaux et développement d’Alexandrium minutum. Les analyses de niche écologique montrent une préférence d’Alexandrium minutum pour les conditions estivales (température et lumière élevées) avec une tolérance pour des conditions plus estuariennes ainsi que des conditions environnementales plus favorables en Bretagne pour le développement d’A. minutum. L’analyse fonctionnelle sur les taxons de microphytoplancton a mis en évidence 3 périodes 2009 – 2011, 2011 – 2015 et 2015 – 2018. La première est associée à la dominance de Chaetoceros qui décline ensuite, la deuxième est représentée par la dominance d’A. minutum et la troisième correspond au déclin d’A. minutum ainsi qu’à une plus grande précocité des blooms de microphytoplancton. Appliqué à l’estuaire de Daoulas, un modèle numérique de dynamique d’A. minutum en compétition avec 72 autres phénotypes de phytoplancton a mis en évidence et hiérarchisé les facteurs de contrôle d’A. minutum. Ce dernier est contrôlé d’abord par la température puis par les phosphates et enfin par les nitrates en été. Ce modèle adimensionnel simule les 10 années mesurées et reproduit la variabilité saisonnière et interannuelle d’A. minutum et de l’ensemble de la communauté phytoplanctonique mais sous-estime les concentrations de phosphate en été et donc les abondances du microphytoplancton, fortement limitées par les phosphates. Ce biais réduit sa capacité à simuler des scénarios de réduction des apports en azote et phosphore, le phosphore étant largement plus limitant que l’azote. Il met néanmoins en évidence le fort déséquilibre trophique existant dans les milieux du fond de la rade de Brest où les apports excessifs d’azote par les fleuves Mignonne et Aulne (et les autres aussi) provoquent des rapports azote/phosphore extrêmement élevés. Plusieurs pistes d’évolution du modèle ont été testées comme la prise en compte des kystes (phase de dormance d’A. minutum et d’autres espèces), la mixotrophie (capacité à assimiler de la matière organique en plus de la photosynthèse) ou l’apport de cellules venant de la rade. Ces travaux n’ont pas amélioré le modèle et il est ainsi possible d’affirmer que le bloom d’A. minutum est essentiellement lié à sa capacité photosynthétique et de développement local. L’extension du modèle à l’ensemble de la rade est en cours mais compliquée du fait de la gestion des frontières ouvertes avec la Mer d’Iroise ce qui suppose plus d’informations sur les 72 phénotypes simulés. La comparaison du suivi de la Pointe du Château avec les suivis existant en rade, centre Rade (Lanvéoc) et entrée de la rade (Ste Anne) montre l’aspect particulier de l’estuaire de Daoulas avec un développement local et des abondances de nanophytoplancton, picophytoplancton et A. minutum bien supérieures au centre et entrée de la rade. Enfin, un système d’alerte est testé sur les 12 années, basé sur le suivi journalier des débits, température et coefficient de marée. Il est une ouverture vers un système plus robuste à perfectionner et une mise en place opérationnelle possible.
Mot-clé(s)
microalgue toxique, diversité phytoplanctonique, modèle, rade de Brest, bassin versant
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Version officielle éditeur | 92 | 9 Mo |