Rapport de mission sur les récifs artificiels en Espagne et au Portugal - 12-23 avril 1999
L'Espagne et le Portugal sont de gros consommateurs de produits de la mer avec 42 et 60 kg par habitant et par an, respectivement. Ces deux pays accueillent également un important flux de tourisme, principalement sur les régions côtières. Enfin, comme le reste des pays européens, l'Espagne et le Portugal sont confrontés à une stagnation des apports de la pêche malgré l'accroissement de l'effort, y compris dans les petits fonds (moins de 50 m), normalement interdits de chalutage. C'est dans ce contexte que l'Espagne et le Portugal ont engagé depuis une douzaine d'années des programmes d'immersion de récifs à une échelle importante:
- 87 projets réalisés, plus une dizaine en cours de mise en oeuvre
- environ 973 km2 de zones protégées du chalutage illégal
- environ 110 000 tonnes de structures de béton dont 75% sont à vocation de protection et 25 % à vocation de production (structures creuses ou alvéolées).
Trois experts d'Ifremer ont effectué une mission de dix jours dans plusieurs regions littorales engagées dans des programmes de récifs artificiels : Catalogne, Andalousie, Algarve et ont pu rencontrer de nombreux acteurs impliqués dans ce domaine : coopératives de pêcheurs, administrations régionales, Ministère espagnol de l'Agriculture et de la Pêche, bureaux d'étude spécialisés, instituts de recherche (CSIC, IEO, IPIMAR). Leurs conclusions peuvent être résumées en trois points :
1. Ces structures sont efficaces pour la défense passive des zones à protéger contre le chalutage illégal : zones interdites et herbiers;
2. Leur implantation s'accompagne toujours d'une augmentation de la production de la pêche côtière artisanale, notamment pour les débarquements d'espèces nobles prisées, mais cet accroissement n'a été évalué qu'au Portugal (entre 30 et 120 %) ;
3. Ces résultats positifs justifient, pour les régions espagnoles littorales, la poursuite des programmes d'immersion, sans modification particulière ni des matériaux, ni des structures, ni de la stratégie d'implantation. Cependant, le Ministère espagnol de l'Agriculture et de la Pêche souhaiterait «à l'avenir, moins de béton et plus d'études» car le faible nombre d'études scientifiques réalisées sur les récifs ne permet ni de conclure sur l'importance de «l'effet récif» sur le moyen terme, ni sur ses mécanismes au plan du micro-écosystème récifal comme au plan du macro-écosystème que constitue la zone aménagée.
Au Portugal, même si ces deux aspects ont été mieux étudiés avec la collaboration des pêcheurs, il reste de très nombreux points à approfondir avant de pouvoir proposer une politique d'aménagement complète ciblée avec des effets prévisibles et mesurables. En particulier, la recherche d'une synergie entre des repeuplements en juvéniles d'une espèce prisée et la présence de récifs alvéolés n'est pas encore abordée.
Dans ces deux pays, il apparait une volonté de coopération scientifique au plan européen, associant les pays les plus engagés dans ce domaine (Espagne, Portugal, Italie, France), le réseau spécialisé déjà créé (EARRN, géré en Grande Bretagne) et avec le soutien financier de la DG 14. Deux instituts se sont déclarés intéressés pour étudier un tel programme: l'IPIMAR pour le Portugal et le CSIC pour l'Espagne.
Dao Jean-Claude, Lacroix Denis, Veron Gerard (1999). Rapport de mission sur les récifs artificiels en Espagne et au Portugal - 12-23 avril 1999. https://archimer.ifremer.fr/doc/00142/25302/